- ŠTÚR (L.) ET SON ÉCOLE
- ŠTÚR (L.) ET SON ÉCOLEŠTÚR L’UDOVÍT (1815-1856) & SON ÉCOLEÉcrivain, animateur de la vie littéraire et homme politique slovaque, L’udovít Štúr est issu d’une famille protestante d’instituteurs. Il parachève ses études à l’université de Halle, où il subit la profonde influence de Herder et de Hegel. Adjoint de Palkovi face="EU Caron" カ à la «chaire de langue et littérature tchécoslovaque» au lycée évangélique de Presbourg (Bratislava), il déploie une intense activité parmi ses jeunes élèves. Destitué par les autorités hongroises (1844), il dénonce l’oppression des Slaves dans deux ouvrages écrits en allemand. Entre-temps, avec ses amis Hurban et Hod face="EU Caron" ゼa, et avec l’approbation du grand poète catholique Ján Holly, il décide, en 1843, de faire du dialecte de la Slovaquie centrale une langue littéraire. Ainsi, après une première tentative du catholique Anton Bernolák, vers 1790, les Slovaques se séparent-ils du tchèque littéraire qu’ils avaient utilisé depuis la fin du XIVe siècle tout en y mêlant des expressions locales. Štúr fixe aussi la nouvelle orthographe et défend cette séparation linguistique que combattent vivement les Tchèques (Palacky, Havlí face="EU Caron" カek...) ainsi que les Slovaques Kollár et Šafa face="EU Caron" シík. En 1845, Štúr lance un bi-hebdomadaire (avec un supplément littéraire) et s’engage, comme député de la diète de Hongrie, dans la lutte politique qui culmine dans les années mouvementées de 1848-1849: il rédige les «demandes de la nation slovaque», ce qui lui vaut un mandat d’arrêt de Kossuth; il participe à Prague au congrès slave interrompu par les événements révolutionnaires et l’intervention militaire autrichienne; il organise la résistance militaire slovaque anti-hongroise à partir de la Moravie. Finalement, une fois la révolte hongroise écrasée par les Russes et les Autrichiens, les Habsbourg abandonnent les Slovaques à leur sort dans la partie hongroise de leur Empire.Retiré à Modra, Štúr dit sa déception dans les Chants et chansons (Spevy a piesne , 1853). Il élabore sa conception du rôle prépondérant de la poésie chez les Slaves et formule ses idées sur la solidarité slave dans un ouvrage en allemand qui ne paraît d’abord qu’en traduction russe (1867). Il disparaît en 1856, victime d’un accident mortel. Homme de sacrifice au service de l’esprit et de sa patrie, Štúr est le magnus parens de la politique slovaque moderne et de toute une «école» littéraire, à laquelle il imprime sa marque romantique: ces poètes se mettent à l’écoute des sources populaires — notamment à travers les chansons — et se dévouent à la cause nationale, mais aussi sociale, voire révolutionnaire.Outre son plus proche collaborateur et ami, le poète, prosateur et publiciste Jozef Miloslav Hurban (1817-1888), et Janko Matuška (1821-1877) qui reste surtout connu comme l’auteur du poème-chanson Il y a des éclairs sur les Tatras (Nad Tatrou sa blyska , 1844) qui fera en 1918 partie de l’hymne national tchécoslovaque, quatre poètes et un prosateur, incarnent surtout, des années trente au début des années soixante-dix, le mouvement romantique: Samo Chalupka (1812-1883) ne crée qu’une trentaine de poèmes mais leur vigueur leur assure un exceptionnel retentissement, en particulier Mor ho! (Détruisez-les! ). Le paisible pasteur Andrej Sládkovi が (1820-1872) laisse, entre autres, deux chefs-d’œuvre de lyrisme: dans Marína (1846), il chante l’amour d’une belle femme en exaltant la splendeur du paysage slovaque et l’attachement profond à sa patrie. Plus épique, L’Homme de Detva (Detvan , 1853) est encore une histoire d’amour située au XVe siècle, dans une région célèbre pour la majesté de son cadre et pour les vertus, les traditions de liberté et de fierté de son peuple. Tous les mystères de l’existence et de la création de l’«étrange» Janko Král’ (1822-1876), romantique par excellence, ne sont pas encore percés. Plein de contradictions et de fébrilité révolutionnaire en 1848-1849, il combat, l’arme à la main, la tyrannie, l’injustice sociale, cela au prix de la prison. De plusieurs dizaines de ses poèmes (il en détruit beaucoup), réunis seulement après 1950, se détachent ses ballades, le fragment du cycle philosophique Drame du monde (Dráma sveta ), ou encore le poème sur une insurrection paysanne dans laquelle Král’ invoque le souvenir du héros populaire Jánošík, pendu par les autorités hongroises en 1713. Ce même réfractaire trouve son chantre en Ján Botto (1829-1881). Si son romantisme penche vers le lyrisme élégiaque, la passion de la liberté éclate dans son épopée en neuf chants, La Mort de Jánošík (Smrt’ Jánošíkova , 1862): entre les lignes, Botto inscrit non seulement sa sourde douleur devant les espérances avortées, mais aussi les aspirations de tout un peuple crucifié. Parmi tous ces poètes, un seul excellent prosateur, Ján Kalin face="EU Caron" カiak (1822-1871). Professeur et finalement directeur de lycée en Silésie tchèque, mis à la retraite pour patriotisme, il est l’auteur de récits historiques; c’est cependant une nouvelle aux traits réalistes et humoristiques, Les Élections (Reštavrácia , 1860) qui assure sa survie littéraire.Pour la littérature slovaque, l’apport de Štúr et de son école est essentiel. Passée la longue et sombre période d’après 1849 qui, en dépit de quelques lueurs, culmine dans les années soixante et soixante-dix — avec le compromis funeste austro-hongrois de 1867, l’oppression sociale, la magyarisation brutale, la suppression des seuls trois lycées slovaques et de la seule institution culturelle, la Matica slovenská (1863-1875) — le flambeau sera repris par la génération de Hviezdoslav et de Vajansky.
Encyclopédie Universelle. 2012.